Onzième Article
L a P r é c i s i o n
Au cours de nos nombreux débats dans nos Cafés Philo, le point de vue débattu était celui qui portait sur la communication. Chacun avait sa propre définition.
Qu'entend-on réellement par Communication ? Les êtres vivants communiquent de mille manières. On connait les messages du corps, des mots, les rites, le passage des émotions. Et pourquoi pas, les messages de l'intuition.
Le langage des mots, bien qu'étant le plus mauvais moyen de communication, est souvent le plus utilisé. Pour l'employer au mieux, il est nécessaire d'être rigoureux avec une grande précision et surtout de pratiquer une logique impeccable, quel que soit le style sélectionné, familier, journalistique, scientifique, poétique, ou même automatique.
Déjà à la fin du 19° siècle, un individu hors du commun avait abordé cette grande question des Evidences. Il avait poussé la recherche linguistique jusqu'au bout du raisonnement. Il avait réussi à mettre en lumière l'importance des aléas, la valeur de la précision mentale, des codes, la place prépondérante du grain de sable, des nuances et le poids immense des impondérables.
Alfred KORZYBSKI est né en Pologne en 1879. Sa famille se compose de mathématiciens, de savants et de scientifiques. Il fait des études d'ingénieur à l'Institut Polytechnique de Varsovie. Il s'expatrie aux Etats-Unis et écrit en 1921 "Manhood of Humanity". Puis il fait paraître : "Time Binding" suivi de "The General Theory" et "Science and Sanity".
Mais surtout il publie en 1933 : "An Introduction to Non-Aristotelian and General Semantic". La Sémantique Générale était née.
Elle voulait donner à l'homme contemporain un outil intellectuel d'épanouissement s'appuyant, grâce à une rigueur sans faille, sur une meilleure compréhension de notre environnement.
La précision de la Sémantique Générale aide à la gestion de l'individu par lui-même, donc un meilleur contrôle de la société. Alors, finis les cloisonnements de pensée, les incompréhensions, le racisme, le mépris de l'autre ! Finis les disputes de couple, les conflits de générations, d'ethnies, de croyances ! Il suffirait pour cela d'employer sans cesse la précision la plus totale.
Désormais ce miracle se produirait uniquement parce que l'on apprend à ne plus porter de jugement de valeur, à ne plus dire : "C'est bien, c'est mal", à être logique à chaque instant et à forcer l'autre à nous respecter au lieu de se forcer à l'aimer !
Ê T R E C L A I R D A N S S A T Ê T E P O U R Ê T R E B I E N D A N S S A P E AU !
Ê T R E B I E N D A N S S A P E AU P O U R Ê T R E C L A I R D A N S S A T Ê T E !
Nous avons souvent beaucoup de travail à faire pour arriver à ce résultat.
Qui peut dire d'ailleurs que l'on y arrive ? Il existe une grande quantité d'exercices attribués à la Sémantique Générale. Un certain nombre d'autres exercices créés par la suite, de façon encore plus précise, sont nés de l'exigence de la Logique de Rigueur Universelle.
Dès 1918, Alfred KORZYBSKI travaille d'arrache-pied sur ces données et sur d'autres du même genre, poursuivant une longue réflexion sur l'homme et son langage.
Dès la publication de son premier ouvrage en 1921, il décide de s'installer aux Etats-Unis où, après une activité de recherche sémantique et psychologique acharnée, il fonde en 1938 à Chicago, "The Institute of General Semantics" qu'il dirige jusqu'à sa mort en 1950, après l'avoir transféré à Lakeville en 1956.
La somme de connaissances psychologiques, psychiatriques, philosophiques et épistémologiques qu'Alfred KORZYBSKI a su assimiler et articuler en une théorie cohérente qu'il a nommée "General Semantics" est énorme.
Dans cette optique, la sémantique étudie comment le langage peut servir d'instrument de manipulation à l'usage des spécialistes du marketing, des publicitaires, des politiciens...
La sémantique générale a des ambitions plus grandes. L'univers de chaque individu peut se concevoir sous deux aspects :
1) le monde extérieur avec ses lois "objectives"
2) le monde intérieur, le Moi, Je, dont la connaissance se confond avec le comportement.
Le Moi cherche constamment à s'adapter au monde extérieur pour améliorer un bien-être physique, plus psychique. La sémantique générale propose d'échapper à la structure aristotélicienne du langage pour qui l'univers est statique alors que la réalité est dynamique.
L'univers quotidien ne sera plus jamais ce qu'il a été. Pour échapper à cette angoisse fondamentale, il est suggéré une révision radicale de la relation au langage.
Les conditions psychologiques et même physiologiques d'une logique non aristotélicienne sont résolument envisagées. Pour celui qui vit la sémantique générale, toutes les pensées sont nuancées.
Il échappe à la dictature du vrai et du faux, du blanc et du noir, de la thèse et de l'antithèse, qui sont comme les deux faces d'une même médaille, enfermant le raisonnement dans les aspects contradictoires d'une même réalité, alors que notre problématique se situe dans la recherche créative.
Alfred KORZYSKI pose ainsi sa vision de l'interactivité entre la cellule vivante et son environnement. L'observation des espèces vivantes à la surface du globe lui permet de définir trois classes, tout d'abord :
1. Energy binding = propriété des plantes de transformer une forme d'énergie en une autre.
2. Space binding = en plus de la propriété précédente, les animaux relient des points de l'espace.
3. Time binding = cette fonction spécifiquement humaine représente la capacité de l'homme à utiliser l'acquis des générations précédentes, d'y ajouter le résultat de ses propres abstractions et de transmettre sa connaissance aux générations présentes et à venir.
(Sémantique Générale aujourd'hui de Michel Saucet. Editions RETZ)
Chloey Till "INFINIMENT LOGIQUE"